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Tisserande de nuages
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Les déesses ases (ásynjur)

Amulette en argent de Tuna (Suède) représentant une femme, plausiblement mythique

Le plus haut rang d’une femme mythique est le titre d’ásynja (pl. ásynjur) « déesse ase ». Le terme englobe l’unique déesse (d’origine) vane connue, dont le nom de Freyja « Dame » est en lui-même un titre social. Snorri affirme d’emblée (Gylfaginning, chap. 20) :

Les ásynjur ne sont pas moins sacrées et n’ont pas moins de pouvoir [que les dieux ases].

Inventaire des déesses ases

L’Edda de Snorri fournit plusieurs listes de déesses plus ou moins longues (Skáldskaparmál, chap. 1 et Þulur ; Gylfaginning, chap. 35). La liste de la Gylfaginning, très élaborée, surprend. En effet, rares sont les déesses citées actives dans les mythes et des femmes mythiques inattendues sont ajoutées.

Snorri liste quatorze déesses stricto sensu… Ce nombre est aussi celui des dieux.

tableau 1 : Liste des Déesses (Gylfaginning, chap. 35)
Nom Fonction
FRIGG La plus grande dame du panthéon vit aux Halles-du-marais
2 Sága Vit aux Bancs-engloutis
3 Eir La meilleure guérisseuse
4 Gefjon Vierge, ses suivantes sont les femmes mortes vierges
5 Fulla Vierge aux tresses libres, à la tête ceinte d’un bandeau d’or. Elle porte le coffret en frêne de Frigg, garde ses chaussures et connaît ses pensées secrètes.
FREYJA De haute naissance (comme Frigg), mariée à Óðr, mère de Hnoss. Freyja a de nombreux noms (Mardöll et Hörn, Gefn, Sýr). Elle possède le Collier-de-Flammes. On l’appelle aussi Vanadís « Dise-des-vanes »
7 Sjöfn Tourne les pensées des femmes et des hommes vers l’amour
8 Lofn Dernier recours des amoureux dont l’union est contrecarrée
9 Vár Écoute les vœux prononcés entre hommes et femmes, et se venge des parjures
10 Vör Sage et curieuse, personne ne peut rien lui cacher
11 Syn Garde la porte de la halle et la verrouille devant ceux qui n’y sont pas admis. Elle intervient dans les procès contre ceux qu’elle veut voir perdre
12 Hlín Va protéger les favoris de Frigg
13 Snotra Enjoint à la modération
14 Gná Va faire les courses de Frigg sur un cheval qui galope sur l’eau et l’air

La plupart sont des déesses mineures, voire de circonstance. En revanche, les déesses majeures manquent, sauf les deux plus grandes : Frigg et Freyja – les seules sans numéro. En plus de leur initiale commune et de leur costume de faucon, le mari de l’une est Óðinn ; celui de l’autre est… Óðr. Bref, elles sont parfois confondues (à tort). De toute façon, Snorri déclare que toutes les déesses peuvent êre appelées du nom d’une autre (Skáldskaparmál, chap. 20) ! En tout cas, cinq des déesses citées (au moins) renvoient à Frigg :

Il ressort de cette liste que le rayon des déesses est l’amour. Du moins, plusieurs en sont spécialistes (Söfn, Lofn et Vár). De fait, Frigg se penche sur l’amour conjugal, et Freyja, sur l’amour charnel. Et pourtant, il y a un domaine bien plus vaste encore que toutes les femmes mythiques partagent : le Destin – la vie et la mort.

Femmes mythiques assimilables aux déesses ases

Snorri ajoute diverses personnalités féminines assimilables aux déesses à sa liste (chap. 35 et 36).

tableau 2 : Déesses assimilées (Gylfaginning, chap. 35 et 36)
Nom Fonction
Sól « Soleil ».
Bil « Moment ».
valkyries Serveuses à la Valhalle, elles sont listées dans les Grímnismál, st. 36 et dans la Völuspá, str. 30. Óðinn les envoie aussi à chaque bataille pour déterminer le camp victorieux. Guðr, Róta et SKULD (la dernière des nornes) en sont d’autres. Leur rôle est de ramasser les guerriers-occis et de décider des combats.
Jörð « Terre », mère de Þórr.
Rindr « Terre », mère de Váli.

Sól et Bil, ainsi que Jörð et Rindr forment deux paires, séparées par les valkyries. Bil semble une anomalie. Comme Sól, pourtant, c’est une fillette enlevée à son père. Son frère et elle ont été kidnappés par Máni « Lune », le propre frère de… Sól. Il faudrait que Bil soit un substitut quelconque du soleil pour que cette mini-liste soit parfaitement symétrique.

Cette liste des déesses comprend aussi (au moins) un membre des trois équipes féminines occupées du Destin :

La þula « liste » des déesses (dernier chap. des Skáldskaparmál) ajoute Rán « Butin, Vol », la géante de la mer à la liste. Celle-ci envoie les marins par le fond et reçoit les noyés. Sont également comptées parmi les déesses :

Les déesses ases majeures

Snorri omet de sa liste la plupart des déesses actives dans les mythes. Il cite chacune d’elles dans sa liste des dieux (Gylfaginning)… mais n’en fait plus que des filles, épouses ou mères d’un dieu. Il concocte une autre liste avec les déesses présentes au banquet offert à Ægir, géant de la mer, par les dieux (Skáldskaparmál, chap. 1). La dernière liste des déesses est celle du banquet des dieux chez Ægir (Lokasenna, prologue).

tableau 3 : Déesses majeures selon les listes de trois textes
Gylfaginning Skáldskaparmál Lokasenna
Frigg, épouse d’Óðinn Frigg Frigg
Nanna, épouse de Baldr et fille de Nepr Nanna
Skaði, épouse de Njörðr Skaði
Freyja, fille de Njörðr et sœur de Freyr Freyja Freyja
Iðunn, épouse de Bragi Iðunn Iðunn
Sif, mère d’Ullr et épouse de Þórr Sif
Sigyn, épouse de Loki Sigyn
Fulla
Gefjon (ou Gefjun) Gefjon (ou Gefjun)
Gerðr

Notes

[1] Les dises (dísir, sing. dís) sont une famille exclusivement féminine. Elles recevaient des sacrifices à titre collectif (dísablót « sacrifice-aux-dises ») et disposaient d’un temple, ou d’une halle à libations (dísarsalr « halle-de-la-dise »). Cette halle ferait d’elles des maîtresses de maison, de celles qui offraient à boire aux hôtes des halles vikings. Des représentations de femmes debout portant une corne (pierres historiées, amulettes en métal) sont des dises plausibles. Deux déesses majeures sont des dises : Freyja et Skaði. La troisième est Iðunn.